Aston Martin, grand outsider des années 50-60

Les premières voitures portant le nom d’Aston Martin remontent à l’époque de la grande guerre mais elles ne sont vraiment apparues dans des épreuves sportives qu’au début des années 20. Ce n’est qu’à partir de 1928 que le nom est durablement entré dans la liste des participants réguliers aux épreuves d’endurance, et en particulier de la fameuse « coupe biennale » laquelle deviendra plus tard les 24 heures du Mans.

Dans un contexte très concurrentiel dominé par les grandes marques telles que Bentley, Talbot, Alfa Romeo, etc. les Aston Martin n’ont cessé d’être présentes dans les classements des grandes épreuves de l’époque, et ceci en dépit de leur petit 4 cylindres de 1500 cm3 et 70 Ch face aux gros moteurs de plus de 2 ou 3 litres (1) des concurrentes.

De 1928 à 1939, les Aston Martin LM (2) ont été classées 16 fois aux Mans, dont une belle 3ème position en 1935, et remportèrent à 5 reprises la victoire dans leur classe. A partir de 1936, la firme cessa de s’engager, laissant à des propriétaires privés le soin de présenter des LM dans les épreuves, et ceci jusqu’à l’aube de la seconde guerre mondiale.

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En 1948, la firme ressort moribonde de 7 années de guerre, elle est au bord de la cessation d’activité. C’est alors que David Brown, un riche industriel du domaine de la construction mécanique, la rachète à vil prix ainsi que, dans la foulée, la société Lagonda qui s’était également illustrée entre les deux guerres avec des voitures surpuissantes.

C’est une renaissance pour la marque et le début d’une période faste en compétition. Dans cette fusion, Aston Martin apportait un prototype futuriste à châssis tubulaire et carrosserie aluminium (3) tandis que Lagonda disposait d’un moteur intéressant de 6 cylindres en ligne à 2 ACT. Bref, David Brown disposait des ingrédients nécessaires pour se lancer dans la construction d’une voiture moderne.

(C) Motorsport.com

C’est ainsi qu’est apparue la DB2 (4) avec sa ligne « ponton » (5) et son moteur de 2,6 litres qui développait initialement 105 Ch mais qui fût ultérieurement poussé jusqu’à 138 Ch afin de permettre une vitesse de pointe théorique de 195 km/h. Elle était par ailleurs dotée d’une suspension indépendante à l’avant et de freins à tambours.

Même si elle se révélait un peu moins puissante, l’Aston Martin DB2 était en mesure de porter la contradiction à sa compatriote la Jaguar XK-120 (6) mais également face aux Ferrari 166, 195 ou 212 avec leur superbe V12 Colombo. Esthétiquement, elle n’était pas en revanche la plus belle de sa génération avec sa silhouette plutôt massive et sa calandre en forme de chapeau melon…

Très rapidement David Brown n’eut de cesse de se frotter à la compétition en engageant ses voitures dans diverses épreuves d’endurance, soit directement, soit par le biais de propriétaires privés. On retrouvera également les DB2 dans diverses autres épreuves (rallye de Monte Carlo, coupe des Alpes, tour de France, etc.).

Conscient que les moyens techniques sont certes nécessaires mais pas suffisants, Brown s’est entouré d’une solide équipe et en particulier de ces deux personnages clé qu’étaient Reg Parnell et John Wyer (7)  lesquels eurent une influence indéniable sur la stratégie et la direction de course durant les années 50.

Dans l’épreuve référence des 24 heures du Mans, face aux grosses cylindrées des Talbot, Allard, Healey, etc. les Aston Martin firent assez bonne figure en obtenant des places honorables dans leur catégorie de cylindrée.

Point d’orgue en 1951, l’Aston Martin numéro 26, aux mains de l’équipage Macklin-Thompson (photo ci-contre) se hisse sur le podium à la 3ème place derrière une Jaguar type C et une Talbot. Au classement de la catégorie des 2-3 litres, trois Aston sont en tête devant une Ferrari 212. David Brown pouvait montrer que l’on allait devoir désormais compter avec Aston Martin. Ceci étant, la DB2 restait une voiture de sport-tourisme et, pour s’imposer de manière plus efficace, il convenait de suivre l’exemple de Jaguar avec la type C, ou de Ferrari  avec la 212, en développant une voiture entièrement conçue pour la compétition.

L‘Aston Martin DB3 présentée en 1952 reprenait un châssis de DB2 renforcé et le même moteur mais avec une cylindrée poussée à 2,9 litres en association avec 3 carburateurs au lieu de 2. Cette configuration portait la puissance à 163 Ch ce qui, associée à un allègement significatif du véhicule, permettait d’atteindre une vitesse de pointe théorique de l’ordre de 200 km/h. Pour le reste, un certain nombre d’innovations ont été tentées, telles qu’une boîte à 5 rapports, un train arrière de type De Dion suspendu par des barres de torsion et des freins arrières accolés au différentiel. Extérieurement, à l’exception d’une inesthétique calandre plate et verticale, il ne s’agissait ni plus ni moins que d’une DB2 à qui on avait enlevé le haut… comme le montre la photo ci-dessus.

Les résultats en compétition furent assez calamiteux et, mis à part une victoire aux 9 heures de Goodwood, aucune DB3 n’a pu terminer une seule des épreuves significatives d’endurance, ne se contentant d’apparaître que dans quelques épreuves de moindre importance. En conclusion la DB3 ne fût qu’une voiture de transition. Si Aston Martin voulait continuer en compétition il fallait, comme le faisaient Ferrari ou Jaguar, passer à autre chose avec une voiture plus spécifiquement dédiée à la course tout en respectant la règle qui prévalait alors, obligeant à ce que les voitures engagées au championnat des constructeurs soient agrées pour une utilisation routière.

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(C) racingcars-wikidot

Ainsi, l’année 53 vit apparaître la DB3S qui fût non seulement parmi les plus belles voitures de sport de son époque mais qui, en dépit d’une motorisation encore un peu faible, a su se montrer très performante et surtout en termes de tenue de route et de maniabilité par rapport à ses principales concurrentes qu’étaient alors les Jaguar et les Ferrari.

Dotée d’un nouveau châssis tubulaire, la DB3S était habillée d’une élégante carrosserie tout aluminium aux lignes galbées et reconnaissable, entre autres, aux échancrures des passages de roues avant et à sa calandre qui préfigurait ce qu’allait devenir la signature de toutes les Aston Martin. Côté mécanique, le bon vieux 2,9 litres 6 cylindres d’avant-guerre était toujours là moyennant quelques améliorations qui lui permettaient d’atteindre les 225 Ch. Pour le reste, retour à une boîte 4 vitesses et abandon des freins arrière inboard, mais en revanche apparition de freins à disque à l’avant, puis ultérieurement sur les 4 roues.

La première sortie de la saison 53 à Sebring fût à la hauteur des ambitions avec une très belle seconde place derrière une Cunningham. Hélas, le reste de la saison sera décevant avec une seule victoire au Tourist-Trophy. Contre toute attente, Aston Martin montera tout de même sur la troisième marche du podium du championnat, loin derrière Ferrari et Jaguar. Il restait encore du travail pour prétendre à de meilleurs résultats…

L’année suivante fût assez brouillonne avec plusieurs tentatives d’améliorations allant de l’adoption d’un compresseur jusqu’à un moteur 12 cylindres, en passant par des retouches d’aérodynamique. Tout ceci n’aboutit à rien de bon et la saison 54 s’est soldée avec seulement deux voitures classées sur l’ensemble des épreuves du championnat. Avec un retour aux principes de base, l’année 1955 fût à peine meilleure pour les DB3S si ce n’est une belle seconde place au Mans avec Peter Collins et Paul Frère, derrière une Jaguar D.

(C) Rex/Shutterstock

Après un petit relookage (8), les DB3S continuèrent leur carrière jusqu’en 1958 en apparaissant ici et là dans les classements et en s’octroyant malgré tout, par deux fois, la seconde place au Mans, en 1956 avec Moss et Collins  (photo ci-contre), puis en 1958 avec les frères Whitehead. Il est à noter ici que c’est essentiellement grâce à leurs qualités de comportement, et en particulier sur piste mouillée, que les DB3S ont obtenu de bons résultats car elles ont toujours souffert par ailleurs d’un manque chronique de puissance.

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Les succès certes encourageants, mais malgré tout mitigés, obtenus durant les années 53-55 ont amené le staff de direction d’Aston Martin à prendre une décision sur la conduite à tenir pour les années à venir. Soit  la firme abandonnait la compétition, soit elle « mettait enfin le paquet » pour produire une véritable voiture de course capable de rivaliser enfin avec Ferrari, Jaguar, Maserati, etc. L’ambitieux et fortuné David Brown choisit bien évidemment la seconde solution, encouragé en cela par le fait que la nouvelle réglementation permettait enfin d’inscrire des voitures au championnat sans devoir les qualifier pour une utilisation sur route.

(C) Wouter Melissen/ultimatecarpage

C’est ainsi que le projet DBR1 fût lancé, à partir d’une feuille blanche, sous la houlette de l’ingénieur Ted Cunning. Tout d’abord, c’est un châssis tubulaire inédit sur lequel étaient soudés des panneaux en aluminium. Par-dessus, la carrosserie en alliage de magnésium est superbe, de quoi faire pâlir de jalousie les Ferrari 250 TR, Maserati 300-s et Jaguar type D.

Outre l’aspect « près du sol » et tout en longueur par rapport à sa devancière, on pourra noter parmi les signes distinctifs les gros évents latéraux de forme triangulaire, les petites ouvertures sur les ailes arrière, la calandre ovale et les phares carénés (9). Bref la DBR1 est une fabuleuse réussite, tant du point de vue aérodynamique qu’esthétique. Pour preuve ces quatre clichés empruntés à l’excellent site de référence qu’est ultimatecarpage. que je vous conseille de visiter pour découvrir des dizaines d’autres photos ainsi qu’un très bon article de synthèse.

Les suspensions étaient indépendantes à l’avant et de type De Dion à l’arrière avec barres de torsion. L’ensemble donnait un véhicule relativement léger (800 kg) avec une garde au sol plus faible que les DB3s.

La motorisation était également nouvelle avec un ensemble bloc-culasse alu de 2,5 puis 2,9 litres de 6 cylindres en ligne avec double ACT, lubrification par carter sec et double allumage. Le tout, alimenté par 3 gros carburateurs Weber, permettait de développer 250 Ch. Une nouvelle boîte à 5 rapports faisait également son apparition. La vitesse de pointe annoncée était de 254 km/h

Malgré tous ces beaux atouts, la DBR1 était encore un peu limite en motorisation par rapport à certaines de ses concurrentes et en particulier des Ferrari avec leur V12 de 300 Ch. Restait donc à voir si la différence pouvait être faite par la dynamique du châssis et le comportement routier.

(C) Simeone Automotive Foundation

Si l’année 56 ne fut qu’un galop d’essai pour la première DBR1 avec son moteur de 2,5 litres, c’est l’année suivante qu’Aston Martin engagea cette fois-ci deux modèles 2,9 litres sous la bannière David Brown Racing. Les résultats ont été encourageants mais encore en net retrait par rapport à la concurrence. Excepté quelques podiums obtenus dans des épreuves anglaises ou à Spa, c’est surtout la victoire au Nürburgring que l’on retiendra. Au final Aston est à la 4ème place du championnat, loin derrière Ferrari, Maserati et Jaguar, et à un tout petit point devant Porsche et ses « petites » 550 RS.

L’année 58 devait désormais voir trois DBR1 sur les circuits. Cette fois-ci les résultats furent meilleurs et en particulier avec deux belles victoires, d’une part au  Nürburgring avec Moss et Brabham et d’autre part à Goodwood avec à nouveau Stirling Moss en binôme avec Tony Brooks. Au classement final du championnat, Aston Martin se hisse à la seconde place derrière Ferrari avec 18 points contre 32, et à égalité avec Porsche en 3ème position. A noter que ce beau résultat  le doit aussi à une vaillante DB3s qui a terminé seconde au Mans…

(C) via l’automobile ancienne

Enfin 1959 fût l’année de la consécration. David Brown Racing présentait 5 DBR1, on allait voir ce qu’on allait voir…! Si les débuts n’ont pas été convaincants à Sebring où Salvadori fût contraint à l’abandon, les choses se sont nettement améliorées dans les 3 dernières épreuves. Au Nürburgring, c’est une nouvelle victoire pour Stirling Moss associé à Fairman.

Deux semaines plus tard, deux DBR1 finissent en tête des 24 heures du Mans avec les équipages Salvadori-Shelby et Trintignant-Frère et ceci avec 26 tours d’avance sur une meute de 4 Ferrari 250 GT (9) (10).

(C) les24heures.fr

Tous les espoirs étaient enfin permis. Le couronnement est venu début septembre au Tourist Trophy de Goodwood où Moss et Shelby terminent en tête tandis que l’équipage Franco-Belge Trintignant-Frère prend la 4ème place. Non seulement Aston Martin remportait enfin les 24 heures du Mans, mais décrochait en plus le titre de champion du monde des constructeurs avec 24 points devant Ferrari et Porsche.

Pour Aston Martin ce sera la première et la dernière victoire au Mans et le seul titre de champion du monde des constructeurs. Pour David Brown, c’était aussi le moment de faire le bilan. S’il a atteint son rêve ultime, cela lui a coûté très cher et la poursuite dans la compétition ne s’avérait peut-être pas très pertinente. Il convenait de se recentrer sur des activités plus lucratives. Ainsi, plus aucune Aston ne se présenta en compétition au titre de l’usine durant les quelques années qui ont suivi. Les DBR1 ont été revendues à des écuries ou à des propriétaires privés. On en retrouvera une au Mans en 1960 qui finira 3ème aux mains de l’équipage constitué de Jim Clark et Roy Salvadori.

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Il ne faut pas oublier que, parallèlement à l’activité sportive, Aston Martin produisait des automobiles de grand tourisme. Après la DB2 dont on a parlé au début de cet article (jusqu’à son ultime évolution Mark III), le renouveau est apparu en 1958 avec la toute nouvelle DB4.

(C) classicdriver.com

Il s’agissait d’un très élégant et très confortable coupé 2+2 bâti sur une infrastructure allégée, conçue par le carrossier milanais Touring. Elle était constituée d’un châssis tubulaire et d’une carrosserie en aluminium.

Sous le capot, on trouvait un bloc moteur de 6 cylindres en ligne, tout alu, à double ACT de 3,7 litres et 240 Ch (11). Les suspensions indépendantes étaient innovantes tout comme le freinage assuré par des freins à disque sur les 4 roues. En dépit d’un poids de 1300 kg, la DB4 était une voiture performante, capable d’atteindre 200 km/h et d’accélérer de 0 à 100 km/h en moins de 10 secondes. Certains puristes s’accordent à dire qu’il s’agit de la plus belle de toutes les Aston Martin.

(C) automobile-sportive.com

Un an après la sortie de la DB4, une version destinée à la compétition est présentée sous la dénomination DB4-GT. Il s’agissait de répondre à une forte demande de la clientèle.
L’ambition était de pouvoir rivaliser avec les Ferrari 250 GT, lesquelles dominent largement la compétition dans la catégorie Grand-Tourisme.

Extérieurement elle ne diffère qu’assez peu de sa grande sœur, excepté par des prises d’air élargies et des optiques carénés. En revanche l’effort a porté sur l’allègement d’une centaine de kilos par l’adoption d’une carrosserie en alliage de magnésium et par une réduction sensible de l’empattement. La motorisation est la même mais elle a été boostée à 300 Ch avec 3 carburateurs au lieu de deux et un double allumage associé à deux distributeurs.

Si la DB4-GT a fait forte impression lors de ses premières sorties en se montrant capable de faire douter les Ferrari 250-GT en version LWB, ceci ne dura hélas pas très longtemps dès lors que Ferrari présenta sa redoutable version berlinetta châssis court SWB encore plus légère, sans parler d’une future GTO quelques temps plus tard…

(C) Desmond J. Smail

C’est ainsi qu’une version encore plus performante a vu le jour de 1959 à 1963 sous le nom de DB4-GTZ. Il s’agissait d’une série très limitée de 19 exemplaires conçus et réalisés  à Milan par Zagato, lequel était un carrossier réputé pour la réalisation de véhicules de sport allégés (superleggera).

(C) Desmond J. Smail

Ainsi, la GTZ perdait encore 40 kilos par rapport à la DB4-GT, avec en prime une coupe encore plus aérodynamique (12) et débarrassée de tous les éléments superflus, allant des pare chocs aux équipements intérieurs en passant par les vitres latérales et arrière qui ont été remplacées par du plexiglas. La motorisation évoluait également pour atteindre alors une puissance de 314 Ch avec une vitesse de pointe qui frisait les 250 km/h et une accélération de 0 à 100 km/h en 6 secondes.

(C) Eddy Clio – Caradisiac.com

Tout ceci n’a pas été suffisant pour inquiéter sérieusement les Ferrari, lesquelles étaient alors les reines de la piste toutes catégories confondues et plus précisément en catégorie GT avec les 250 GT jusqu’en 61 puis les GTO à partir de 62.

Ceci étant, les DB4-GTZ n’ont laissé personne indifférent car, si elles ont été malchanceuses dans les grandes épreuves de championnat, elles ont malgré tout brillé dans d’autres non moins connues telles que Brands-Hatch, Goodwood, Silverstone, Aintree, etc.

Parmi les GTZ emblématiques il faut noter celle de Franc & Kerguen qui s’est illustrée au Mans en 1961 où elle a tenu jusqu’à la 23ème heure avant d’être contrainte à l’abandon, à l’occasion d’un relais, sur un problème de démarreur tandis qu’elle occupait la 9ème place après d’une course exemplaire. Nous en parlerons en détails à la fin de cet article.

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(C) newsdanciennes.com

Sous la pression de certains importateurs ou clients, Aston Martin s’engagea dès 1961 dans ce qui fût appelé les « project cars ». Il s’agissait de véhicules expérimentaux construits à partir de composants existants mais en s’appuyant tout de même assez largement sur les bases de la DBZ dont elles reprenaient l’allure générale en toujours plus profilée. D’une certaine manière, les project cars ressemblaient de plus en plus à leurs grandes rivales qu’étaient les Ferrari GTO et en particulier en adoptant l’arrière tronqué (13).

Etant amenées à concourir en catégorie prototype, Ted Cutting pouvait envisager assez librement des évolutions « à la volée », ce qui amena, petit à petit, à des voitures ultra performantes mais qui souffraient en revanche d’une certaine fragilité de par le manque de temps consacré aux essais. Ce furent les premières Aston Martin à dépasser les 300 km/h. L’une d’elle fût même chronométrée à 320 km/h.

Au total 3 véhicules ont été construits sous les numéros DP212, DP214 et DP215. Elles furent engagées par l’usine aux 24 heures du Mans entre 1961 et 1964, souvent confiées à de grands noms tels que Graham Hill, Richie Ginther, Jo Schlesser, Bruce Mac Laren, Phill Hill, Lucien Bianchi, Innes Ireland, etc. Hélas, en dépit de performances très prometteuses, aucune de ces voitures ne put terminer la course.

Pour reprendre l’expression utilisée dans cet article qui lui est consacré, « les Aston Martin DP sont les DB4 ultimes« . C’est la fin de l’épopée qui s’annonce avec le départ de John Wyer. Pour sa part David Brown jette l’éponge après avoir consacré une grande partie de sa fortune à la compétition. Il faudra attendre de très longues années avant de voir à nouveau des Aston Martin sur les pistes d’endurance au début des années 80.

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Comme ceci est pratiquement toujours le cas, je vais terminer en évoquant les miniatures, et plus particulièrement deux d’entre elles que j’ai la chance de posséder. Il est à noter ici que les reproductions d’Aston Martin sont assez peu nombreuses. A l’échelle 1/43 le choix est encore correct, en revanche ce n’est pas le cas à l’échelle 1/18.

Pour commencer je vais parler de cette reproduction d’une Aston Martin DB4 GT Zagato devenue célèbre. Il s’agit en effet de celle que j’ai évoquée précédemment à propos des 24 heures du Mans 1961.

Après 23 heures de course et 3850 km sur 286 tours, la DB4 qui portait le numéro 1 était placée en 9ème position, et 3ème de la classe des GT. Jean Kerguen s’arrête alors au stand pour un dernier relais en laissant le volant à Jacques Dewes.

C’est là que le démarreur refusa de fonctionner. Une panne électrique a eu raison de cette belle performance alors que la belle DB4 Zagato blanche n’était plus qu’à 50 minutes du but et en passe de remporter la 3ème place dans la catégorie des GT derrière deux Ferrari 250 GT.

On ne sait pas grand-chose de Jean Kerguen (1925-2005), si ce n’est qu’il est originaire du Morbihan et qu’il a vécu pas mal de temps au Maroc. Il était ce que l’on appelait alors un « gentleman driver » passionné de course automobile et entre autres d’Aston Martin avec lesquelles il participa à de très nombreuses épreuves, et ceci dès l’après-guerre avec les premières DB2. Son nom est souvent cité dans des rallyes et en particulier celui du Maroc, lequel était particulièrement difficile (14). Il a par la suite couru sur des DB3S puis sur des DB4 GT. En 1957 il termine 11ème des 24 heures du Mans sur une DB3S et remporte le titre de la classe des moins de 3 litres.

En 1961 il s’engage aux 24 heures du Mans avec une DB4-GTZ toute neuve achetée à l’importateur marocain et ornée de deux bandes longitudinales aux couleurs du pays. Toutefois, pour cette épreuve particulière, il s’est associé le support de Marcel Blondeau, premier importateur Aston Martin en France et propriétaire du célèbre Garage Mirabeau à Paris. Il faisait équipage avec son ami Jacques Dewes mieux connu à l’époque sous son pseudonyme « Franc ». Par la suite il participa à nouveau à cette épreuve avec des DB4 puis jeta ensuite son dévolu sur des Porsche 904, 911, etc.

S’agissant du modèle réduit c’est une fois de plus d’une reproduction à l’échelle 1/18 réalisée par le constructeur CMC dont j’ai déjà eu l’occasion de parler dans différentes articles.

Comme toujours, c’est du travail de haut de gamme avec une fidélité et une finesse de reproduction remarquables. Les portières, capot et coffre arrière s’ouvrent pour montrer un intérieur « comme si on y était ».

A l’arrière, on va y retrouver la roue de secours, posée sur le réservoir de carburant supplémentaire, et attachée avec sa ceinture de cuir. On notera au passage les deux bouchons de remplissage des réservoirs lesquels peuvent également s’ouvrir.

(C) cmc-modelcars.de

Enfin, le clou du spectacle, avec cette reproduction époustouflante du moteur 6 cylindres en ligne où rien ne manque, pas une seule tubulure, pas un seul câble. En cherchant bien sur la photo ci-contre, on pourra peut-être même y localiser le démarreur récalcitrant… 😀 même si ce dernier n’est pas facilement visible sur le véhicule assemblé.

Les roues peuvent bien entendu se démonter pour permettre d’admirer les mécanismes de suspension et de freins. Enfin, si vous retournez ce bel objet, vous constaterez que le même soin a été porté à la reproduction des différents éléments mécaniques, des échappements et autres tubulures des circuits de freinage.

Pour commencer, afin de vous donner un tout petit aperçu de ce modèle, voici trois photos pour vous mettre en appétit…  😉 Cliquez sur chaque image pour la visualiser en plein écran.

Ensuite, si vous voulez voir davantage de photos allez visiter cette galerie plus complète de quelques photos que j’ai réalisées récemment.

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La seconde miniature est celle de la DBR1 victorieuse aux 24 heures du Mans en 1959. Elle était pilotée par l’équipage anglo-américain constitué de Roy Salvadori et de Carroll Shelby.

Cette année là, Aston Martin alignait 4 DBR1 dont 3 sous pavillon « usine » face à la domination de Ferrari qui alignait pas moins de 6 voitures 250 TR modèle 59 encore plus affûtées.
Sinon il allait falloir également compter sur une Jaguar D, toujours très rapide mais en fin de carrière, deux Lister et une Tojeiro. Pour le reste il s’agissait en grande partie de voitures de plus faible cylindrée (Porsche, Lotus, DB, Osca, Triumph, etc.) qui allaient concourir dans leurs catégories respectives.
A noter, pour la première fois, une catégorie Grand-Tourisme  dans laquelle, en haut du classement par cylindrée, se présentaient 4 Ferrari 250 d’écuries privées.

Dès le départ, la DBR1 n°4 de Stirling Moss prend le commandement afin de « faire le lièvre » pour épuiser les Ferrari. Après deux heures de course, l’équipage Gurney-Behra sur leur Ferrari finissent par prendre la tête, suivis par Gendebien et Hill. Lorsque Moss et Fairman sont contraints à l’abandon, les Ferrari sont en difficultés mécaniques et laissent la DBR1 n° 5 de Salvadori-Shelby prendre la tête de la course pendant 4 heures. Hill et Gendebien qui ne se résignent pas reprennent le contrôle jusqu’à la 19ème heure où leur V12 finira par lâcher et donner ainsi la voie libre aux deux DBR1 qui n’auront plus qu’à voler vers la victoire sans prendre de risque. Les deux voitures finissent quasiment dans le même tour en bouclant les 4300 km à la vitesse moyenne, incroyable pour l’époque, de 180 km/h (15).

S’agissant maintenant du modèle réduit, ce sera cette fois-ci une reproduction à l’échelle 1/18 en résine réalisée par Spark. Hormis l’absence de parties ouvrantes, il s’agit d’un modèle particulièrement soigné et fidèle à l’original, je n’en veut pour preuve que la présence des flasques de roues arrières, effectivement présentes en compétition mais que certaines reproductions concurrentes ne font pas apparaître. D’autre part on apprécie également le soin qui a été porté pour l’habitacle avec son tableau de bord très détaillé ainsi que ses accessoires.
En guise de premier aperçu, voici quelques photos sachant que vous pourrez en voir davantage en cliquant ICI !


Notes :

(1) voire même beaucoup plus par exemple avec les Bentley et leurs gros moteurs de plus de 6,5 litres.
(2) Contrairement à l’idée reçue, cette appellation n’aurait rien à voir avec Le Mans mais serait plutôt la reprise des initiales du fondateur de la marque Lionel Martin.
(3) Il s’agissait du prototype dénommé « Atom ».
(4) Elle fût en fait précédée dès 1948 par une éphémère version « sport 2 litres » qui porta a posteriori la dénomination DB1.
(5) Cette dénomination s’appliquait alors aux voitures dont les portières se trouvaient dans la continuité des ailes avant et arrière contrairement à ce qui se pratiquait auparavant avec des ailes ou des gardes boue distinctifs.
(6) Voir l’article que j’ai consacré à Jaguar durant les années 50.
(7) On retrouvera plus tard ce dernier quand je parlerai des Ford GT-40 puis des Porsche 917.
(8) Calandre ovale, phares carénés, autant de particularités que l’on retrouvera plus tard sur la DBR1.
(9) En effet, ce fût la déroute chez Ferrari où aucune des 250TR n’a pu terminer la course, laissant ainsi le soin aux 250 GT privées de sauver l’honneur. Il en a été de même pour les Jaguar.
(10) On remarquera que, pour cette épreuve, les voitures disposaient d’ailes avant enveloppantes et de flasques de masquage des roues arrière, le but étant d’améliorer l’aérodynamique et de gagner ainsi 10 km/h dans la grande ligne droite des Hunaudières.
(11) Ce moteur était l’oeuvre de l’ingénieur motoriste maison Tadek Marek qui avait également conçu un V8 mais dont les moteurs n’ont jamais été au point dans les bons délais pour la compétition, le bon vieux moteur hérité du 6 cylindres Lagonda lui ayant été préféré.
(12) Celle-ci était l’oeuvre du styliste Ercole Spada et s’inspirait beaucoup de ce que Pininfarina et Scaglietti ont pu faire pour le compte de Ferrari avec les 250 GT et GTO.
(13) Cette particularité aérodynamique a commencé à se développer au début des années 60. Elle était désignée par le terme « Kamm tail » (du nom de son inventeur) et se retrouvait par exemple sur les Alfa Romeo TZ, puis sur les Ferrari GTO, les Shelby Cobra, etc. puis se généralisa pendant pas mal d’années qui ont suivi.
(14) Ce rallye particulièrement éprouvant était une sorte d’intermédiaire entre la Targa Florio et la Carrera Panamericana.
(15) Il semblerait que l’ordre d’arrivée ait été imposé par le directeur de course d’Aston Martin. En effet, pour des raisons stratégiques, il aurait été préféré donner l’avantage à l’équipage anglo-américain plutôt qu’au franco-belge constitué de Maurice Trintignant et Paul Frère.


Références :

Cet article doit beaucoup au très bon livre de Jacques-Louis BERTIN et Arnald P. MILLEREAU intitulé « Aston Martin en compétition » aux éditions E.T.A.I.

Il retrace toute la carrière sportive des Aston Martin, depuis les débuts durant les années 10 jusqu’aux années 2000 avec les fabuleuses DBR9 et autres Lola-Aston.

Pour le reste, comme souvent, j’ai puisé de l’information dans un certain nombre de sites parmi lesquels quelques incontournables tels que :

Sinon, quelques références nouvelles :

Et quelques autres que j’ai déjà cités dans l’article lui-même. Il se peut aussi que j’en ai oublié, qu’ils m’en excusent et me le signalent, je me ferai un plaisir de rectifier.

De même, j’ai eu recours à quelques rares photographies pour lesquelles je n’ai pas réussi à identifier la source exacte, et en particulier lorsque ces documents se retrouvent dans de nombreux autres sites sans référencement d’origine. Si vous savez à qui je dois attribuer le (C) n’hésitez pas non plus à me contacter.

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