Porsche 90x – L’ascencion vers la gloire

Dans l’article consacré à la 550 RS nous avions vu que cette dernière avait marqué l’entrée de Porsche dans le domaine de la compétition. En effet, de 1953 à l’aube des années 60, les Porsche 550 ont assez largement dominé la concurrence dans la catégorie des cylindrées inférieures ou égales à 1500 cm³.

Porsche 904 GTS - LMC14Au tout début des années 60, en dépit d’une évolution notable de la RS avec la 718 RSK, il semblait évident que Porsche allait devoir passer à autre chose.
C’est ainsi qu’est apparue la célèbre Porsche 904, également connue sous le nom de Carrera GTS. Le projet a été confié au jeune designer Alexander Porsche (dit Butzi), petit fils de Ferdinand Porsche et fils de Ferry. C’est lui qui est considéré comme le designer de la mythique 911 (Voir la généalogie de la famille Porsche).

Sur la base d’un châssis classique en acier de type « échelle » (2), la voiture adoptait une élégante carrosserie en fibre de verre nettement plus moderne et aérodynamique. La motorisation était toujours assurée par un 4 cylindres à plat, refroidi par air en position centrale. Il affichait une cylindrée de 2 litres et pouvait développer entre 150 et 180 Ch (1). Les trains roulants sur suspension indépendante disposaient de freins à disque sur les 4 roues. Avec 650 kg sur la balance, la petite nouvelle pouvait théoriquement prétendre à une vitesse de pointe de l’ordre de 260 km/h.
Afin de s’inscrire dans la catégorie GT, l’usine s’est mise en ordre de marche pour une production en série d’au moins 100 exemplaires.

La 904 s’illustra, en 1964 et 1965, aussi bien dans les grandes courses d’endurance que dans le championnat d’Europe de la montagne, ou encore dans des rallyes, et en particulier dans celui de Monte-Carlo.
Aux 24 heures du Mans elles remportèrent par deux fois l’épreuve dans la catégorie des moins de 2 litres en s’intercalant crânement au classement général au milieu d’une armada de Ferrari et de Ford Cobra. Au tour de France 64 elles ont montré leur aptitude à ce type d’épreuve sur route en effectuant un joli « tir groupé » de la 3ème à la 6ème place derrière deux Ferrari GTO.
La 904 sera une belle réussite qui permettra à Porsche de remporter par deux fois le championnat du monde des moins de 2 litres.

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Même si la carrière des 904 s’est prolongée bien au-delà de ces deux années aux mains d’équipes privées, ce ne fût qu’en grande partie dans des épreuves routières (rallyes et courses de côtes) sinon aux Etats-Unis où elles ont joui d’une belle popularité.
La 904 a toutefois permis à Porsche de renforcer l’idée de continuer dans le domaine de la compétition, et plus particulièrement pour se frotter aux grands leaders qu’étaient alors Ferrari et Ford dans les épreuves d’endurance. Par ailleurs, la concurrence de la Ferrari Dino 166 dans la classe des 2 litres montrait qu’il fallait également relever le défi pour le championnat européen de la montagne.

Cette fois-ci le projet ne sera pas piloté par Alexander Porsche mais par son cousin Ferdinand Piëch, lequel va lui ravir la vedette et devenir le père de la lignée glorieuse jusqu’à la célèbre 917.

(C) http://ultimatecarpage.com/

Avec la Porsche 906, souvent connue sous le nom de Carrera 6, la firme placait la barre encore un peu plus haut.
Ce nouveau modèle différait sensiblement de la 904 avec le retour à un châssis tubulaire et une carrosserie encore plus allégée. Côté moteur c’est le nouveau 6 cylindres à plat de 2 litres, déjà expérimenté sur la 904, qui officiait. Il développait un peu plus de 200 Ch.
Conçue en soufflerie, la 906 préfigurait déjà l’allure générale de toutes celles qui vont lui succéder. Dans un souci d’économie la 906 héritera des roues de 14″ de la 904 ce qui justifiait les  larges échancrures dans la carrosserie pour maintenir une garde au sol optimale.
Cinquante exemplaires ont été produits durant l’année 1966, puis 15 autres ultérieurement pour faire face à la demande des clients. En catégorie GT, la motorisation était classique avec 2 carburateurs Weber tri-corps tandis que 9 exemplaires étaient engagés en catégorie prototype avec un système à injection. A noter enfin que 6 exemplaires ont été dotés, à titre expérimental, d’un moteur Flat-8.

porsche-906LH-30-LM66Les résultats obtenus furent très honorables mais se limiteront le plus souvent à des victoires de classe et assez rarement avec des podiums au classement général, excepté lors de la Targa-Florio de 1966.
Porsche marqua tout de même les esprits lors des 24 heures du Mans de la même année en alignant 4 voitures aux 4, 5, 6 et 7ème places, derrières 3 Ford GT-40 et en devançant les 275 GTB rescapées du clan Ferrari !
A cette occasion, Porsche va inaugurer une configuration hyper-profilée dite « longue queue » (LH) qui permettait d’atteindre des vitesses de pointe supérieures sur les grandes lignes droites. On verra par la suite que cet artifice aérodynamique sera largement utilisé, non seulement par Porsche mais également par beaucoup d’autres constructeurs.

Dès juillet 1966 une évolution de la 906 est apparue sous le nom de code 910. D’apparence assez similaire elle se distinguait malgré tout par des formes plus arrondies et l’abandon des portes en ailes de mouette. Une reprise de la géométrie des suspensions a permis d’abaisser la garde au sol et l’adoption de roues magnésium de 13″.
Il faut croire que la recette était bonne car, malgré une courte carrière, les 910 ont collectionné de nombreux podiums durant l’année 1967 avec, en particulier, un triplé à la Targa Florio et au Nürburgring et de très honorables 3ème ou 4ème places à Sebring ou à Daytona derrière les Ferrari P4 ou les Ford GT-40.
La dynamique pour l’ascencion vers la gloire était enclanchée…

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(C) Mathieu Heurtault & hemmings.com

Evolution logique dans la philosophie Porsche de l’innovation permanente, la Porsche 907 se présentait comme une 910 dont on avait allégé le châssis et la carrosserie et augmenté la puissance du moteur. Elle était équipée de base par un Flat-6 de 2 litres développant 220 Ch. Par ailleurs les freins à disque ventilés faisaient leur apparition. L’aérodynamique était pour sa part encore plus travaillée.
Elle fût présentée dans cette configuration aux 24 heures du Mans 1967 où elle réussit à se placer 5ème (derrière les Ford GT-40 Mk IV et les Ferrari 330 P4) à plus de 200 km/h de moyenne soit autant que la Ford GT-40 victorieuse l’année précédente et ceci avec un moteur d’une cylindrée presque 3 fois moindre (3).

Daytona_69_Porsche x3Dans la perspective d’un changement radical de la réglementation par la FIA (lequel allait mettre sur la touche Ford et Ferrari), Porsche s’est lancé dans une nouvelle version de la 907 équipée cette fois-ci d’un 8 cylindres de 2,2 litres développant 270 Ch.
Sûr de son fait, La firme aligna 4 voitures aux 24 heures de Daytona et y réussit un triplé historique en devançant ses principales concurrentes qui étaient alors les Alfa-Romeo 33/2. Un peu plus tard, c’est avec un doublé que les 907 se sont imposées aux 12 heures de Sebring.
Si la Floride s’était montrée favorable à Porsche, le retour en Europe ne fût pas aussi convaincant. En effet il a fallu faire face aux « revenantes » avec les anciennes Ford GT-40 reconditionnées par John Wyer afin d’entrer à nouveau dans les critères de la FIA.
Bien que la victoire de Porsche au  championnat du monde pouvait paraître évidente pour beaucoup,  le coup de grâce fût donné aux 24 heures du Mans de 1968 où une 907 a du s’incliner derrière une GT-40 Mk1 (4).
Pour Porsche, le titre de champion du monde lui échappait une fois de plus à seulement 3 petits points de Ford. Seule consolation le titre en catégorie GT avec une domination sans partage des 911.

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« Porsche 908 LH (C) commons.wikimedia.org

Alors que Porsche préparait la 917 (son arme de guerre pour s’imposer enfin), la Porsche 908 se devait d’assurer l’intérim en continuant à engranger des résultats en attendant que la firme construise les 25 unités requises de la 917 pour être agrée par la FIA.
La 908 était dotée d’un moteur 8 cylindres de 3 litres et 350 Ch dont la technologie commençait à dater un peu. Toutefois, bien qu’elle ne fût pas initialement vouée à une longue et brillante carrière, elle remporta les 1000 km du Nürburgring en 1968 et se plaça 3ème aux 24 h du Mans de la même année.
La 917 ayant eu par ailleurs des soucis de mise au point, l’année 1969 fût plutôt faste pour Porsche et sa 908, laquelle s’adjugea les victoires à Brands Hatch, Monza, Targa Florio, Spa, Nürburgring et, cerise sur le gâteau, en s’adjugeant une très belle 2ème place aux 24 h du Mans avec Hermann et Larousse, lesquels ne concédèrent que 120 mètres d’avance à la GT-40 de Ickx et Oliver !!

70_Porsche-908-1Ainsi, contre toute attente, la 908 a enfin permis à Porsche de remporter « haut la main » le championnat du monde des constructeurs avec 20 points d’avance sur Ford.
Mieux encore, sa carrière a continué pendant plusieurs années en complémen-tarité avec la 917, laquelle n’était pas vraiment adaptée pour certaines épreuves, et en particulier sur des parcours sinueux.
De ce fait, on pouvait la voir habillée de différentes carrosseries, allant de la version profilée type Le Mans avec la longue queue (LH) à la version spyder courte que l’on voyait plutôt sur des circuits tels que le Nurburgring ou la Targa-Florio. Dans sa version coupé LH, la 908 préfigurait très nettement ce qu’allait être la 917.

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En guise de conclusion, ces 6 années ont permis à Porsche d’affûter ses armes pour affirmer encore plus sa notoriété sur les circuits, mais également pour conquérir le titre tant convoité de champion du monde des constructeurs de sport prototype.

On remarquera que, fidèle à sa méthode consistant à travailler dans un processus d’amélioration continue, les modèles se sont suivis à une cadence soutenue à raison d’un tous les 18 mois ou 2 ans tout au plus. Ceci rappelle un peu l’époque des premières 356 sorties de l’atelier autrichien de Gmünd dont aucune n’était strictement identique à l’autre.

Toutefois, il ne vous aura pas échappé qu’il y reste un trophée que Porsche n’a jamais encore pu installer sur ses étagères. En effet, hormis des victoires de classes (1500 cm³, ou 2 litres) aucune Porsche n’a franchi en tête la ligne d’arrivée des 24 heures du Mans qui était, et reste encore, l’épreuve de référence des courses d’endurance. Les secondes places, sur le fil, concédées en 1968 et 1969 ont laissé un goût amer aux dirigeants de la firme de Stuttgart.

C’est ainsi que Porsche se décide à frapper un grand coup en concevant une machine de guerre avec la 917, laquelle a balayé la concurrence pendant 2 années, remportant à deux reprise le Mans face aux Ferrari 512 et ceci jusqu’à ce qu’un nouveau changement des règles de la FIA intervienne, favorisant l’émergence de constructeurs tels que Matra ou Alfa-Roméo. De tout ceci nous parlerons bientôt dans un nouvel article.

En guise de bonus, cliquez ici pour visualiser un petit diaporama de photos prises lors du Mans Classic 2014 où de nombreuses Porsche 90x étaient présentes.

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Enfin, ne nous quittons pas sans aborder le domaine des miniatures… 😉

Comme toutes les grandes marques, Porsche fait l’objet de nombreuses reproductions de ses modèles. S’agissant des voitures citées dans cet article, elles ont été souvent reproduites, mais le plus souvent à l’échelle 1/43. Il suffit de consulter, par exemple, le catalogue du constructeur Spark pour s’en rendre compte. En revanche, les reproductions à l’échelle 1/18 sont beaucoup plus rares. Spark, AutoArt et Minichamps semblent être les principaux constructeurs dans le domaine.

Ici je vais vous présenter un modèle relativement rare sur le marché de l’occasion. Il s’agit de la reproduction réalisée par Minichamps de la Porsche 906 châssis n° 151 qui a participé aux 24 heures du Mans 1966 et qui a terminé 5ème (2ème de sa classe des moins de 2 litres de cylindrée). Elle faisait donc partie du groupe des quatre Porsche qui, à défaut de battre les invincibles GT-40, ont dominé sans ambiguité le reste de la concurrence.

Avec son numéro 31 Cette voiture était pilotée par les deux fidèles parmi les fidèles de la marque, Hans Herrmann et Herbert Linge. Ils termineront après avoir parcouru preque 4600 km à l’honorable moyenne de 189 km/h, certes loin des 200 km/h des vainqueurs mais avec un moteur de seulement 2 litres de cylindrée face aux GT-40 et leurs gros V8 de 7 litres.

Il s’agit là d’une très bonne reproduction comme Minichamps sait le faire et dont j’avais déjà eu l’occasion de juger de la qualité avec une Maserati birdcage évoquée par ailleurs dans ce blog.

Ce modèle possède des ouvrants assez bien ajustés, que ce soient les portes papillon, le petit capot avant qui laisse ainsi voir le radiateur d’huile, les réservoirs de Lookeed et la roue de secours. A l’arrière le long capot se détache pour adminer la reproduction très détaillée du moteur avec son système d’injection, les suspensions, les réservoirs et les imposantes tubulures de refroidissement.

En attendant une séance photo plus soignée, voici déjà un premier aperçu de cette belle miniature.

Références :

La rédaction de cet article s’est appuyée sur de nombreuses sources d’information :

  • Tout d’abord, citons une fois de plus le très bon livre de Chris Harvey consacré à Porsche dans la collection « Les grandes marques » aux éditions Gründ.
  • Ensuite, s’agissant d’un article de transition entre celui consacré à la 550 RS et celui à venir sur la 917, je m’en suis tenu en grande partie aux informations de Wikipédia en anglais soit :
  • Même chose pour le site Ultimate car page dont les articles sont précieux et facilement abordables, sans oublier les belles galeries de photos associées.
  • J’en profite également pour vous conseiller l’excellent site de News d’Anciennes qui propose des articles très détaillés. Concernant les Porsche cités ici, n’hésitez pas à aller lire les articles consacrés à la 904 et la 908.
  • Et enfin quelques autres que j’ai cités, soit dans le texte, soit dans les légendes des photos que je suis permis de leur emprunter. Je vous invite également à aller les visiter pour en savoir davantage.
  • Et puis, j’en ai peut-être oubliés quelques uns, qu’ils m’en excusent et me le signale. Je me ferai un plaisir de rectifier cette liste de références.

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Notes :

(1) Certaines versions ont été équipées du nouveau 6 cylindres développé pour la 911 et quelques autres ont même reçu le 8 cylindres dérivé de la 804-F1, celui que l’on a retrouvé par la suite sur les 906 ou les 908.
(2) Il s’agissait d’un châssis très simple constitué de deux longerons parallèles reliés entre eux par des traverses soudées.
(3) Elle était menée par l’équipage constitué du fidèle et incontournable Hans Hermann et du talentueux pilote Suisse Jo Siffert. Derrière eux trois autres Porsche, une 910 et deux 906.
(4) Arrivèrent à la suite une autre Porsche (la 908 de Neerpasch-Stommelen) puis une série d’Alfa 33/2 qui ont fait le spectacle en aiguillonnant l’armada des Porsche.

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1 Responses to Porsche 90x – L’ascencion vers la gloire

  1. Gilles dit :

    Nouveau ! Cet article vient d’être significativement réactualisé.

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