Dylan is Dylan

Il y a peu de temps, Françis Cabrel a produit un nouvel album intitulé « Vise le ciel » avec ce sous-titre « Bob Dylan revisité ».

Vous avez compris qu’il s’agit d’un album entièrement dédié à l’interprétation de chansons de Bob Dylan.

Ceci n’a rien d’étonnant compte tenu du fait que Cabrel fait souvent référence à Dylan, et ceci depuis de nombreuses années. Il l’a montré à plusieurs reprises en introduisant, de temps à autres, certains de ses titres dans ses propres albums (1).

Il a par ailleurs bien pris le soin de préciser qu’il s’agit d’une version dite « revisitée« . En effet, les tempos ne sont pas toujours ceux des versions originales, son timbre de voix très différent est omniprésent, même si parfois les intonations collent bien à celles de Dylan. Je pense à la célèbre chanson « Je te veux » (I want you) dans laquelle, en dépit d’un rythme plus lent, on ne peut pas passer à côté du phrasé de Dylan. Pour ce qui est des orchestrations, il y a, là aussi, une véritable signature de Cabrel sans toutefois trahir l’original.

S’agissant du choix des chansons, la plupart sont tout de même des titres connus des amateurs de Dylan, même s’il ne s’agit pas forcément des plus emblématiques, d’ailleurs certaines m’étaient inconnues. Cabrel a puisé assez largement dans le répertoire depuis les années 60 (I want you, It’s all over now, just like a woman…) jusqu’aux années 90 (Dignity).

Pour terminer, la traduction s’est voulue la plus proche possible de l’original (2). Je peux difficilement en juger mais je suis prêt à croire les experts du domaine qui le disent… 😉

Si en première écoute, je n’ai pas été particulièrement enthousiasmé par cet album, je dois dire maintenant que, plus je l’écoute, plus je le trouve bon, voire excellent, et finalement assez respectueux de « l’esprit Dylan ». Je porte une mention particulière à « La ballade d’Hollis Brown » (3) , « Comme Blind Willie Mc Tell » et « La dignité », mais les autres titres ne déméritent pas non plus, loin de là.

Autrement dit, cela vaut la peine d’écouter mais hélas, Môssieu Cabrel ne nous fait l’honneur d’être présent sur Deezer, donc je ne peux pas vous fournir le moindre lien.

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Bien avant, vers le milieu des années 60, Hugues Aufray fût certainement le premier en France à se lancer dans l’interprétation de l’œuvre de Bob Dylan, qu’il avait rencontré quelques années plus tôt. C’était l’époque où ce genre de musique ne touchait qu’une population assez limitée. Avec cet album, Aufray a eu l’immense mérite de faire connaître cet artiste d’outre atlantique, et par là même de sensibiliser la jeunesse à un certain nombre de choses dont Dylan parlait dans ses chansons (en particulier de la guerre du Vietnam, du racisme, mais pas uniquement cela).

En dépit d’une qualité qui n’a plus rien à voir avec ce qui se fait aujourd’hui (malgré la remastérisation), ces adaptations sont encore intéressantes à écouter et n’ont rien perdu de l’esprit qui prévalait à l’époque. Il est vrai toutefois que la traduction opérée par Pierre Delanoë n’était qu’assez approximative pour les puristes (2). Aufray et lui ont, semble-t-il, davantage cherché à faire coller des rimes avec la musique, laquelle en revanche n’a pas trop subi d’adaptation. De ce fait le challenge était difficile à relever. De cet album je retiens encore « La ballade de Hollis Brown »,mais aussi « La mort de solitaire de Hattie Caroll« , « Les temps changent », « La fille du Nord », « Corrina, Corrina »,  et les très subversifs « Dieu est à nos côtés » et « Oxford town« .

Plus récemment, en 2009, Hugues Aufray a réalisé un nouvel album d’Hommage à Bob Dylan intitulé « New Yorker ». En fait il s’agit de la reprise de 13 titres interprétés en duo avec un certain nombre de chanteurs ou chanteuses connu(e)s. Le résultat est certes sympathique mais très inégal selon les interprètes associés. On pourra toutefois retenir de cet album « La fille du Nord » avec Eddy Mitchell, « Knock, Knock » avec Bernard Lavilliers, « L’homme orchestre » avec Laurent Voulzy et surtout une superbe interprétation de « Heartland » (Au cœur de mon pays) avec Arno (voir l’article que je lui ai consacré récemment). Les autres chansons sont assez insignifiantes. A noter toutefois la première piste dans laquelle Aufray récite un monologue très émouvant dans lequel il évoque ses différentes rencontres avec Dylan.

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Pour beaucoup de ma génération, Bob Dylan a marqué notre univers musical. Pour ma part, j’ai cessé de m’intéresser à ce qu’il a fait à partir des années 80, date à partir de laquelle il a entamé une période mystique un peu surprenante, et qu’il a d’ailleurs plus ou moins abandonnée par la suite. Pour en savoir plus sur Bob Dylan.

Pour terminer, à propos du titre donné à cet article, ceci rappellera peut-être à certain(e)s les paroles du refrain d’une chanson de Michel Delpech « Wight is Wight » (Wight is Wight/Dylan is Dylan/Wight is Wight/Viva Donovan …).

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Notes :

(1) Je pense en particulier à deux titres parus dans ses albums Les beaux dégâts et Des roses et des orties, à savoir respectivement « S’abriter de l’orage » et « Elle m’appartient » qui sont superbement interprétés.
(2) Ce sujet est un peu polémique. Hugues Aufray s’était déjà fait clouer au pilori dans les années 60, provoquant même semble-t-il un coup de gueule de Dylan lui-même.
(3) De manière anecdotique, lorsque j’étais en classe de terminale, un professeur atypique pour l’époque (remplaçant stagiaire) nous avait fait traduire cette chanson, et fait faire la comparaison avec l’interprétation qu’en avait fait Hugues Aufray. Le but était de nous montrer la difficulté qu’il y a à reprendre ainsi des répertoires en langue étrangère, surtout lorsque le texte est aussi fort que c’est le cas dans les chansons de Dylan.
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