Les films vus ce mois-ci sont, d’une manière générale, plutôt bons. 🙂
Parmi les 8, il n’y en a que 3 que je n’ai considéré que comme « moyens » mais qui restent tout de même tout à fait dignes d’intérêt. C’est d’autant plus étonnant que j’ai pu apprécier par ailleurs aussi bien Stéphane Brizé que Anne Le Ny dans d’autres de leurs réalisations. De même j’ai toujours beaucoup apprécié Sandrine Bonnaire et je suis un peu déçu par ce premier long métrage à qui il ne manque pourtant pas grand chose pour être un chef d’oeuvre.
Pour les 5 autres c’est au moins du 4/5, et même deux coups de cœur pour « American Beauty » et « Welcome » qui, chacun dans leur style, m’ont carrément « scotché ».
A noter enfin, une fois n’est pas coutume, la présence dans cette chronique cinéma du téléfilm « Quinze jours ailleurs » que j’ai trouvé très bon et qui méritait, selon moi, bien mieux qu’une simple diffusion TV.
Pour mémoire, les chroniques des mois précédents, ainsi que le récapitulatif 2012, sont consultables en suivant ce lien.
La signalétique, sur une échelle de 1 à 5, soit du meilleur au pire :
- Insomnia. :-). Une jeune fille vient d’être assassinée en Alaska. Afin d’aider la police locale, Will Dormer, policier chevronné, un brin désabusé et aux méthodes bien personnelles, y a été dépêché avec son adjoint, Hap. Les soupçons se portent assez rapidement sur Walter Finch, étrange personnage qui faisait partie du cercle de connaissances de la jeune fille. Une chasse à l’homme s’ensuit dans un épais brouillard et, tandis qu’elle était sur le point d’aboutir, croyant mettre en joue Finch, Will abat accidentellement son collègue. S’apercevant de sa méprise, il récupère instinctivement le pistolet abandonné par le fuyard et le place près du corps de Hap. La situation se complique rapidement par le fait que Finch a vu Dormer effectuer ce geste. Il va en profiter pour lui faire subir une longue et éprouvante opération de chantage visant à se faire disculper et à faire porter le meurtre sur le petit ami de la victime. Tout ceci se passe durant l’été boréal quand il ne fait pratiquement jamais nuit, ce qui fait que Will souffre de plus en plus du manque de sommeil et commence même à avoir des hallucinations. Christopher Nolan, maître du genre, nous emmène ici dans un thriller haletant où la psychologie des différents personnages prend une place très importante. L’atmosphère y est oppressante, dans les paysages inhospitaliers du grand nord, et sous cette lumière uniformément blafarde. Pour ne rien gâcher le casting est de qualité avec Al Pacino grandiose dans le rôle de Will Dormer, Robin Williams machiavélique dans celui du meurtrier et Hilary Swank dans celui de la jeune policière, partagée entre son admiration pour le grand policier qu’est Will et sa volonté de faire aboutir la vérité. Plus d’information sur Allociné.
- American beauty. :-D. Dans son confortable pavillon de banlieue, Lester Burnhamm mène une vie qui ne lui convient pas. Il est enfermé entre un travail qui ne le passionne guère, une femme plus ou moins hystérique qui l’ignore et une fille en pleine crise d’adolescence qui le méprise. C’est alors qu’un déclic provoque en lui un changement radical dans son comportement. Il décide de faire dorénavant ce qu’il veut, quand il veut et comme il veut, sans se préoccuper de son entourage. Il commence par « flasher » sur une copine délurée de sa fille, puis à envoyer balader son employeur, tout en lui jouant un petit chantage, à dépenser de l’argent sans compter etc. Entre autres choses, il lie également connaissance avec le fils de son nouveau voisin, un garçon étrange qui est amoureux de sa fille mais qui s’adonne par ailleurs au trafic de drogue et dont Lester devient un des clients réguliers. Bref, cet homme voudrait qu’on l’aime mais son comportement agace tout le monde jusqu’à suggérer, pour certains, des instincts de meurtre. Pour ce premier film (qui date de 2000), Sam Mendes joue un coup de maître. Il confirmera par la suite, et en particulier avec le très beau « Les noces rebelles ». Pour sa part, American Beauty est une sorte de thriller psychologique au travers de la vie de cet homme qui est en quête de reconnaissance et qui a « besoin d’exister » aux yeux de son entourage. En dépit de situations jubilatoires, c’est un véritable drame personnel qui se déroule devant nos yeux, et au passage une peinture au vitriol d’une société de « middle class » pour qui les valeurs humanistes n’ont plus de sens. S’il faut parler des acteurs, on retiendra surtout l’interprétation du grand Kevin Spacey, lequel est parfaitement juste et très émouvant dans le rôle de Lester. Il a obtenu pour cela un Oscar et c’est amplement mérité. Plus d’information sur Allociné.
- Quelques heures de printemps. :-|. Alain, bientôt la cinquantaine, était chauffeur routier jusqu’à ce qu’il se fasse arrêter pour transport illégal (de marchandises ou de clandestins ? cela n’est pas dit). Après 18 mois de prison il est contraint de retourner chez sa mère, septuagénaire rigide et maniaque avec qui il avait eu, par le passé, des relations houleuses. Les retrouvailles ne sont pas particulièrement chaleureuses mais ils se supportent tant bien que mal. Alain accepte un travail peu valorisant mais il noue par ailleurs une relation amoureuse avec une jeune femme à qui il n’a rien dit de son passé. Pour sa part Yvette, sa mère, se sait atteinte d’une grave maladie pour laquelle elle subit des traitements lourds en toute discrétion et avec stoïcisme. Fortuitement, Alain s’aperçoit que sa mère s’est engagée dans une démarche dite de « mort choisie », autrement dit de suicide assisté au travers de l’aide d’une association en Suisse. A partir de cet instant Alain et Yvette vont-ils se ré-apprivoiser dans la perspective tragique de la maladie ? Sur un tel sujet délicat, Stéphane Brizé aurait pu faire quelque-chose de très intéressant, et c’est d’ailleurs ce qu’il fait dans la première partie du film. Hélas, tout ceci traîne bien trop en longueurs et se termine par une sorte de documentaire sur la « fin de vie choisie », ce qui n’est peut-être pas sans intérêt, mais qui gâche complètement le film dans sa globalité. Heureusement il reste les interprétations inspirées d’Hélène Vincent et de Vincent Lindon, sans oublier Olivier Perrier dans le rôle du voisin qui joue le rôle de médiateur entre la mère et le fils avec un naturel remarquable. De Stéphane Brizé, j’avais adoré « Je ne suis pas là pour être aimé » (je vous le recommande vivement) mais là je suis un peu déçu. Toutefois, si l’on en croit les critiques, il semblerait que son film précédent : « Mademoiselle Chambon » soit à voir. Plus d’information sur Allociné.
- 15 jours ailleurs. 🙂 Vincent est un cadre très actif, chargé des achats dans un groupe agro-alimentaire. La pression y est très forte et il la répercute, avec une certaine griserie, sur ses fournisseurs. Du côté vie sentimentale, il n’a que peu de temps à consacrer à son épouse. C’est dans ce contexte qu’il se trouve un jour confronté à des pratiques peu loyales de la part d’une jeune collègue qui le court-circuite dans une affaire. A bout de force et de nerfs, il « pête les plombs » en pleine réunion, tentant de se faire du mal devant tout le monde. Il est emmené d’urgence à l’hôpital où les médecins détectent un très sérieux « burn-out » et demandent l’accord de son épouse pour le faire interner en psychiatrie. Là il se retrouve au milieu de quantité de gens en situations toutes plus graves et plus complexes les unes que les autres. Il se sent totalement exclu, à la fois de la plus grande partie des autres patients, que du personnel qui est en sévère sous-effectif. Seule une jeune patiente, a priori mythomane, le prend en affection et il entre plus ou moins dans son jeu. Au bout de deux semaines, alors qu’il est enfin autorisé à sortir, il ira jusqu’à la faire évader pour rejoindre le fils dont elle dit avoir été séparée. Ce téléfilm mériterait amplement d’être porté au grand écran. Au travers d’un phénomène de société de plus en plus médiatisé, le réalisateur Didier Bivel a su échapper au piège du docu-fiction habituel pour nous raconter une véritable histoire où l’amitié et l’amour sont présents, et où la situation de détresse morale et les conditions psychiatriques sont décrites avec justesse, sans excès, sans pathos ni recherche de pédagogie. Pour couronner le tout, Didier Bourdon y est d’une très grande crédibilité. D’ailleurs présent au débat qui a suivi, on a pu constater à quel point il s’est investi dans ce rôle. A ses côté Judith Chemla, que je ne connaissais pas jusque-là, est impressionnante par son jeu de jeune femme paumée et prisonnière de ses démons. Plus d’information sur Allociné.
- Cornouaille. :-|. Odile, jeune femme dynamique, et qui a plutôt les pieds sur terre, est amenée à s’éloigner quelques temps de Paris, et de Fabrice son amant. En effet, elle doit prendre possession de la maison que lui a léguée sa tante, en Bretagne. Arrivée à Audierne, Odile voit progressivement resurgir dans sa mémoire des bribes de son enfance dont, entres autres, la mort de son père. Conjointement, Loïc, un voisin qui se dit être un des ses amis d’enfance, fait irruption dans sa vie et semble en effet connaître beaucoup de choses d’elle. Petit à petit, alors qu’elle s’active à vider la maison de son mobilier afin de la vendre, les souvenirs continuent à remonter et Odile va jusqu’à entamer de longs dialogues avec des personnes disparues. Pendant ce temps, Loïc continue à se montrer de plus en plus pressant, voire inquiétant. Basé initialement sur un scénario plutôt original, où le surnaturel s’invite dans ces magnifiques décors de campagne Bretonne, Anne Le Ny tire ici un film qui se révèle être, au final, assez moyen en dépit de la présence de Vanessa Paradis et de Samuel Le Bihan. Tout ceci est assez confus, décousu, et sans réelle perspective. Je suis d’autant plus déçu de cette réalisation d’Anne Le Ny que j’avais beaucoup apprécié son autre film « Ceux qui restent » (voir cette autre chronique de février). Plus d’information sur Allociné.
- Du vent dans mes mollets. 🙂 Rachel est une petite fille de 9 ans, discrète et plus ou moins angoissée, otage d’une mère qui la couve exagérément, d’un père installateur Mobalpa qui rabâche sa jeunesse difficile, et d’une grand-mère hémiplégique, qui observe tout sans rien dire et qui plus est, partage sa chambre. Inquiète de son comportement, sa mère décide de l’emmener chez une psychologue pour enfants. La véritable thérapie va venir d’ailleurs avec la rencontre de Valérie, petite fille espiègle et délurée, au langage plutôt direct et dont la famille est aux antipodes de la sienne (la Maman est plutôt cool et le frère en pleine crise d’adolescence). Rachel va ainsi apprendre à dire des gros mots, à faire des bras d’honneur aux automobilistes sur les passages piétons, à espionner les amours secrets des profs de l’école, et même à faire des cachot-teries à ses parents, bref la vraie vie…! Ce film de Carine Tardieu est une bouffée de bonheur salutaire avec cette plongée tout à fait pertinente dans l’enfance du début des années 80. C’est drôle, c’est plein de tendresse et d’émotion et de plus truffé de petits clins d’yeux au niveau des décors, des dialogues ou de la bande son. Les acteurs, quant à eux, sont tous épatants en commençant par les deux petites héroïnes qui sont tellement naturelles dans leur jeu. Pour leur part, Denis Podalydès est touchant en Papa discret et pince sans rire, Isabelle Carré est craquante en célibataire post-soixante-huitarde qui prend la vie comme elle vient, et Agnès Jaoui parfaite dans le rôle de la mère juive ultra protectrice qu’on ne peut pas ne pas aimer très fort quand même ! Dans ce joli petit film on alterne sans cesse entre rire et émotion jusqu’à une fin totalement inattendue. Certains critiques intello n’ont pas aimé, peu importe, le public lui ne s’y est pas trompé. Plus d’information sur Allociné.
- J’enrage de son abscence. 😐 A la suite du décès accidentel de leur enfant, Jacques et Mado se sont séparés. Jacques est retourné dans son pays aux Etats-Unis tandis que Mado a refait sa vie avec Stéphane dont elle a un enfant, Paul. Dix ans plus tard, Jacques revient en France pour affaires et cherche à rencontrer Mado. Contrairement à elle, il n’a pas su faire le deuil de leur fils et ne fait que s’abrutir dans le travail pour ne pas y penser. Il demande à rencontrer le fils de Mado, Paul, maintenant âgé de 7 ans, ce que Mado accepte sans y voir le moindre inconvénient, à condition que ceci ne soit pas ébruité. Il s’avère que le courant passe très vite entre Jacques et le petit Paul, une affection et une complicité réciproque s’établissent, au point que Mado finit par trouver ceci malsain et leur demande de ne plus se voir. Pour son premier long métrage, Sandrine Bonnaire signe ici un véritable thriller psychologique avec une angoisse qui va crescendo tout au long des 90 minutes que dure le film. Ce sentiment est amplifié par la lenteur du déroulement de l’intrigue et l’aspect répétitif des scènes. Sandrine Bonnaire a visiblement cherché à faire passer un message fort sur la difficulté à faire le deuil de la perte d’un enfant et elle y a parfaitement réussi. Toutefois, il manque à ce film un rythme un peu plus soutenu et une issue un peu plus travaillée. Si William Hurt dans le rôle de Jacques, par excès de lenteur, finit par en être agaçant, Alexandra Lamy est très crédible et émouvante dans le rôle de Mado. Quant à lui, le petit garçon qui incarne Paul est tout à fait craquant de sincérité. Plus d’information sur Allociné.
- Welcome. 😀 Simon et Marion sont sur le point de se séparer. Marion est professeur et s’implique dans les associations humanitaires pour aider les réfugiés qui se massent à Calais dans l’espoir de traverser un jour la Manche pour se rendre en Angleterre. Pour sa part Simon, ex-gloire de la natation, est désormais moniteur à la piscine municipale. Un jour il voit arriver Bilal, un jeune Kurde qui lui demande de lui donner des cours pour améliorer ses performances de nageur. Intrigué par les motivations de ce jeune homme d’une part, mais également pour reconquérir Marion, Simon accepte d’aider Bilal, comprenant bien que celui-ci cherche à gagner l’Angleterre par ses propres moyens à la nage. Bien qu’il tente de l’en dissuader, Simon s’implique de plus en plus, allant jusqu’à héberger son protégé chez lui. Dénoncé par le voisinage, il se trouve assez rapidement dans le collimateur de la police qui, souhaitant endiguer cet afflux de réfugiés, traque tous ceux qui leurs viennent en aide. Ils suspectent même Simon d’être un « passeur ». Après une première tentative, le jeune homme est repris. Quelques temps plus tard il disparaît à nouveau et Simon s’inquiète. Philippe Lioret signe là certainement l’un de ses plus beaux films. C’est une véritable claque que cette immersion dans cet univers des réfugiés de Calais que l’on a tous vécu de manière détachée au travers des informations télévisées. Ici, c’est toute la dimension humaine qui ressort, qui nous interpelle, qui nous bouleverse et nous laisse à réfléchir, autant du point de vue des réfugiés que de celui des Calaisiens confrontés à ce drame humain et qui oscillent entre l’empathie et le rejet. Comme avec le film « 38 témoins » que j’évoquais dans cette autre chronique, on ne peut s’empêcher de se dire « que ferions nous dans de telles circonstances ». Chacun dans leur rôle, les acteurs sont très justes et trèsémouvants, à commencer par Vincent Lindon dans le rôle de Simon, mais aussi par ce jeune inconnu Firat Ayverdi qui est pathétique dans sa détermination pour rejoindre, coûte que coûte sa « fiancée ». Continuez Monsieur Lioret ! votre cinéma est salutaire dans la mesure où il nous ouvre des fenêtres sur l’humanité, et donc sur nous même. Plus d’information sur Allociné.