Après une grande parenthèse durant laquelle je me suis un peu désintéressé du cinéma et de la télévision, voici enfin une nouvelle chronique dans laquelle j’ai regroupé les quelques films que j’ai pu voir durant le dernier trimestre de l’année qui vient de se s’écouler.
Parmi ces huit films, trois sont des biographies filmées ou des adaptations de faits réels et un est une chronique sociale contemporaine. Ceci est hélas souvent le cas pour tout ce que l’on nous propose actuellement et, sans vouloir remettre en cause le talent de grands noms tels que Scorcese ou Eastwood, j’ai eu plutôt tendance à donner une prime aux œuvres originales qui ont eu le mérite de raconter des histoires ou des destins qui sortent un peu de l’ordinaire, ou de ce que les manuels d’histoire ou les médias ont pu nous en donner.
Pour mémoire, vous pouvez consulter les chroniques des mois précédents en suivant ce lien.
La signalétique, sur une échelle à 5 niveaux, soit du meilleur au pire :
- J. Edgar. 🙂 J. Edgar Hoover entra en 1924 au BoI, que l’on connaît maintenant sous le nom de FBI, dont il fût le directeur pendant 48 ans et sous l’autorité de 8 Présidents successifs. Issu d’une famille modeste, il avait des idées bien ancrées sur la notion d’ordre et il structura le FBI de manière efficace pour lutter contre la criminalité, quitte à devoir recourir parfois à des méthodes peu académiques. En particulier il a été l’initiateur d’une vaste opération consistant à « ficher » des centaines de milliers, voire des millions de personnes. On le suspectait d’avoir lui-même un grand nombre d’informations sensibles sur les personnes les plus influentes des Etats-Unis. De ce fait il était craint par le monde politique et les médias. Avec ce grand film, Clint Eastwood signe un biopic passionnant à de nombreux titres. D’une part il nous éclaire de manière édifiante sur la nature de cet homme, à la fois très connu mais également terriblement complexe, intransigeant et sans état d’âme qu’était Hoover dans sa mission officielle, mais aussi sur sa face secrète qui nous montre un homme psychologiquement fragile et introverti. Enfin, et j’oserai dire surtout, l’interprétation du rôle par Leonardo Dicaprio est l’élément clef de ce film. Il est stupéfiant de réalité et il contribue ainsi à mieux nous faire connaître et comprendre qui était J. Edgar Hoover. Pour terminer, ce film est également un bon moyen de réviser nos connaissances sur 60 années de la vie politique américaine et sur les mouvements géostratégiques de la période (de l’entre deux guerres à la guerre froide). Un petit bémol toutefois pour dire que Eastwood est parfois un peu trop « gentil » avec son héros en n’insistant pas trop sur les aspects un peu sombres et contestables du personnage. Plus d’information sur Allociné.
- Le concert. 🙂 Sous l’ère Brejnev, Andreï était chef d’orchestre au Bolchoï mais, ayant refusé de se séparer de ses musiciens juifs, il fût limogé. De nos jours, il travaille toujours au Bolchoï mais pour y faire le ménage, et entre autre dans les bureaux du Directeur. Un soir, il récupère par hasard un fax émanant du théâtre du Châtelet pour inviter l’orchestre à se produire à Paris afin d’accompagner la jeune et désormais célèbre violoniste Anne-Marie Jacquet, laquelle y interprétera le non moins célèbre concerto de Tchaïkovski. Dans la tête d’Andreï se met alors à mûrir une idée folle consistant à rameuter tous ses anciens amis musiciens qui vivent plus ou moins dans la précarité, et de se substituer à l’orchestre du Bolchoï pour aller à Paris et prendre leur revanche. A partir de là c’est toute une épopée truculente qui se déroule sous nos yeux avec des situations cocasses, des quiproquos à gogo, etc. Si cette histoire abracadabrante n’est pas très crédible, on s’amuse malgré tout beaucoup avec cette farce jubilatoire soutenue par des acteurs épatants et qui semblent également s’amuser beaucoup. Ceci pourrait s’arrêter là et ne rester qu’un film sans grand d’intérêt s’il ne nous réservait pas une fin pleine de surprise et bouleversante. En prime, si vous aimez la musique classique, c’est un vrai régal et en particulier on ne se lassera pas du concerto de Tchaïkovski. Plus d’information sur Allociné.
- Le loup de Wall-Street. 🙁 Durant les années 1990, Jordan Belfort défraye la chronique dans les milieux de la finance en pratiquant des opérations très risquées et toujours à la limite de la légalité. C’est ainsi qu’il se constitue très rapidement une fortune considérable au détriment des petits épargnants. Il mène parallèlement une vie outrancière faite de débauche où l’argent, le luxe, la drogue et le sexe sont omniprésents. En dépit de plusieurs épisodes judiciaires et d’une traque des services spécialisés du FBI, rien ne semble pouvoir l’atteindre et son culot est incommensurable. Martin Scorcese est ici une fois de plus à son aise avec cette histoire d’un homme totalement hors norme. Ceci étant, il s’agit d’un film très nerveux, très fatiguant et outrancier. Malgré un casting en béton et en particulier avec Leonardo Dicaprio, je n’ai vraiment pas accroché et durant les 3 heures de diffusion j’ai été plusieurs fois à la limite de jeter l’éponge. Il reste que ce film semble être malgré tout assez proche d’une certaine réalité du monde de la finance et pour cela il a peut-être un petit aspect pédagogique, même si la morale n’en ressort pas grandie. Plus d’information sur Allociné.
- Whiplash. 😀 Andrew a 19 ans et il est passionné de musique et de jazz en particulier. Plus encore il a l’ambition de devenir un grand batteur de jazz et pour cela il fait partie des élèves du célèbre et élitiste conservatoire de Manhattan, lequel est dirigé par Terence Fletcher, un professeur emblématique qui dirige plusieurs orchestres réputés. au sein du conservatoire, la concurrence est acharnée entre tous ces garçons talentueux et ambitieux. Fletcher joue de cela et se montre d’une férocité à peine imaginable vis à vis de ces jeunes talents qu’il n’hésite pas à humilier en permanence, à maltraiter de manière odieuse, jusqu’à un stade qui peut s’apparenter à du harcèlement physique et moral. Son but est de faire naître la crème de la crème pour la gloire de la musique et du jazz en particulier. Ce film de Damien Chazelle est une véritable pépite. On imagine pas que, sur un tel sujet, on se trouve tout à coup plongé dans une ambiance aussi tendue, à la limite de la douleur morale et dans l’incapacité de détourner les yeux de cette histoire. On finit par s’identifier aux personnages tour à tour et, même si Fletcher peut parfois nous révulser, on ne peut s’empêcher aussi de l’admirer dans sa quête de la perfection pour le plus grand honneur du jazz. Les acteurs sont impeccables à commencer par J.K. Simmons dans le rôle de Fletcher. Dans un autre registre, ce film m’a fait penser au très beau et intriguant « Black Swann ». A voir absolument. Plus d’information sur Allociné.
- La prochaine fois je viserai le cœur. 🙁 Fin des années 70 dans l’Oise, plusieurs jeunes filles sont retrouvées mortes, abattues par balles et parfois après avoir été renversées par une voiture. Il semblerait également que d’autres aient été prises en auto-stop. Il n’existe a priori aucun lien entre ces victimes. Le meurtrier est introuvable et aucune piste sérieuse n’émerge de l’enquête de la gendarmerie locale. Ceci est d’autant plus compliqué que le meurtrier n’est autre qu’un des membres de l’équipe chargée de l’enquête en la personne de Franck, un gendarme sans histoire, plutôt effacé et banal. Il va ainsi déjouer toutes les traques jusqu’à ce que la gendarmerie soit amenée à travailler en association avec la police nationale. Ce sera le point de basculement pour Franck. Inspiré de faits réels par l’affaire Alain Lamare, je n’ai personnellement pas trouvé ce film aussi passionnant qu’il aurait pu l’être sur un sujet mêlant à la fois une affaire policière mais aussi un parcours psychologique aussi complexe que celui de ce serial-killer au dessus de tout soupçon. Dès le départ on sait qui a fait quoi et les flash back permanents finissent pas fatiguer. S’agissant de Guillaume Canet, je l’ai vu nettement plus convaincant dans d’autres rôles que celui-ci. Plus d’information sur Allociné.
- Night call. 😀 A Los Angeles, Lou Bloom vit plus ou moins de magouilles ou de petits larcins. Sa culture hétéroclite et approximative, il la tient de ce qu’il trouve sur internet. Ses atouts, un bagout et un culot sans limites. Un jour, se trouvant sur les lieux d’un grave accident de la circulation, il remarque surtout des individus dont la priorité semble être de filmer les événements afin de les vendre ensuite à des chaînes de télévision. Ceux-ci traque les événements qui se passent dans la ville en piratant la radio de la police. C’est ainsi qu’il décide de se lancer dans cette nouvelle activité où, en dépit de moyens techniques rudimentaires, il arrive sans état d’âme à filmer les scènes les plus atroces. Il trouve rapidement une chaîne locale pour les lui acheter. En effet, la directrice de l’information, en difficulté pour maintenir l’audience et sauver son poste, est prête à accepter tout ce qui se présente pourvu qu’il y ait du spectaculaire et tant pis si l’éthique élémentaire est bafouée. Boosté par ce contexte, Lou améliore son équipement, embauche un assistant et se lance dans des reportages toujours plus « limite », jusqu’à pénétrer un jour sur une scène de crime avant même que la police n’y arrive. Ce thriller de Dan Gilroy est d’une puissance incroyable. Après une dizaine de minutes un peu ennuyeuses, on va passer l’heure et demi suivante littéralement scotché devant la monstruosité du cynisme de ce milieu de la presse et les pratiques plus que douteuses de ces chasseurs de scoop. Pour incarner l’abominable Lou Bloom, Jake Gyllenhaal est extraordinaire. Du grand et bon cinéma. Plus d’information sur Allociné.
- Un illustre inconnu. 😀 Sébastien Nicolas, la quarantaine, mène une vie morne entre son travail dans une agence immobilière et son domicile organisé au cordeau et toujours impeccable. Sébastien n’aime visiblement pas la vie qu’il mène, alors il observe les autres et essaie de se projet dans leur vie à eux. Pour cela il use d’un don très particulier consistant à saisir la physionomie de ceux qu’il rencontre au point de pouvoir se grimer de manière à leur ressembler parfaitement, et donc à s’immiscer dans leur vie. Après avoir effectué quelques tentatives sans suite, il est contacté par l’intermédiaire d’un célèbre musicien afin de lui trouver un appartement. Il finit par rencontrer cet homme mystérieux et misanthrope qui vit plus ou moins reclus et dont le passé semble lui être lourd à porter. Benjamin va se grimer afin de lui ressembler mais cette fois-ci il va aller jusqu’au bout de la supercherie. Voici un film certes un peu étrange mais qui a le mérite de nous proposer quelque-chose de vraiment original qui sort des sentiers trop souvent battus et rebattus des biopics et autres adaptations de faits réels. J’ai donc beaucoup aimé et c’est sans hésitation que je lui attribue la côte la plus élevée. Mathieu Kassovitz est absolument fabuleux dans ce rôle complexe et il arrive à nous faire comprendre la souffrance et l’obsession de cet homme qui ne s’aime pas sinon au travers de la vie des autres. Comme beaucoup des films de ce genre, il ne faut pas se rebuter par un démarrage un peu lent, au contraire c’est après que l’on accroche vraiment pour ne plus lâcher. Plus d’information sur Allociné.
- Samba . 🙂 Samba, jeune sénégalais, vit en France depuis 10 ans et, à défaut d’avoir des papiers en règle, il s’arrange pour vivre de petits boulots tout en squattant le petit appartement de son oncle. Ainsi va la vie de notre héros jusqu’au jour où il se fait prendre par la police, laquelle le transfère dans un camp de rétention tout près de Roissy en attendant son passage en jugement et une probable mise en demeure de quitter le territoire. Des associations tentent de venir en aide à ces personnes et Manu fait partie de l’une d’elle. Jeune femme dynamique et débrouillarde, elle est accompagnée d’Alice, cadre supérieure, en convalescence suite à un burn-out et qui cherche à redonner du sens à sa vie en s’impliquant dans cette oeuvre sociale. C’est ainsi que les chemins de Samba et d’Alice vont se croiser en dépit de tout ce qui pourrait a priori les séparer. Après l’incontournable « Intouchables », Olivier Nakache et Eric Toledano récidivent dans un style toujours aussi enlevé mais sur un sujet un peu différent. Après s’être consacré au handicap ils nous plongent cette fois-ci dans le milieu du social et de la précarité. C’est sans prétention mais c’est un film plaisant, plein d’humanité, de sensibilité et d’humour. Omar Sy, Charlotte Gainsbourg, Tahar Rahim et Izïa Higelin sont épatants, sans parler de quelques seconds rôles tout à fait sympathiques. Bref, un bon moment de cinéma. Plus d’information sur Allociné.