Il y a quatre ans, j’ai eu la chance d’assister pour la première fois au Mans Classic qui est une référence incontournable pour les amateurs de voitures de course d’endurance de la période qui va des années 20 aux années 80 (1).
Il est inutile que je décrive ici en quoi consiste cet événement majeur car je l’ai déjà largement évoqué en 2014 dans cet article principal ainsi que dans quelques autres articles plus particulièrement dédiés aux paddocks, aux épreuves de qualifications ou encore aux expositions.
Accompagné de la même équipe, j’ai donc récidivé avec cette 9ième édition. Propulsés par le même enthousiasme, nous comptions bien bénéficier de notre précédente expérience afin de combler, au moins partiellement, nos lacunes et autres frustrations… 😉
Ceci étant, nous ne nous bercions pas d’illusions dans la mesure où nous avions auparavant étudié avec beaucoup d’attention le programme ainsi que la liste des participants.
Nous savions donc déjà qu’il allait, d’une part être impossible de tout voir dans cette seule journée du vendredi, et d’autre part qu’il ne fallait pas espérer la rencontre avec certaines voitures qui ont contribué au mythe des 24 heures du Mans durant cette large période.
Ainsi donc, pas de Ferrari 375, 250 TR, GTO ou autre 330 P4 etc. pas plus que d’Aston Martin DBR1 ou DB3S, de Cobra Daytona etc. En revanche, même si la liste ressemblait beaucoup à celle d’il y a 4 ans, en y regardant de plus près, il fût possible de noter quelques rendez-vous incontournables. Sans être exhaustif, j’avais noté la présence :
- d’une Chenard & Walker vainqueur de l’épreuve en 1923,
- d’une Mercedes SSK,
- d’une étonnante Alfa Romeo 2300 MM,
- d’une Cuningham C4R et de la Cadillac « monster »,
- d’une Maserati 450 S,
- d’une Fiat 8V Zagato,
- d’une Maserati birdcage,
- d’une rarissime Aston Martin DP,
- d’une Ferrari 250 LM,
- d’une assez méconnue Marcos-Volvo,
- d’une belle collection de Porsche 917,
- de deux Ferrari 512 S et M,
- de deux Alfa Romeo tipo 33 dont une TT-12,
- et enfin de quelques autres curiosités parmi les voitures de série de l’époque.
Par ailleurs, les différents plateaux étant bien fournis, j’étais bien décidé à m’intéresser, cette fois-ci, à quelques voitures que j’avais un peu négligées lors de l’édition 2014. Ce fût le cas, entre autres, des « petites anglaises » des années 50-60 (Triumph, Austin Healey, MG, Lotus, Lister, etc.)
ainsi que des modestes mais non moins valeureuses voitures françaises d’après guerre parmi lesquelles les fameuses DB ou Callista mais aussi des plus récentes Alpine, Matra, Ligier, etc.
De fait nous nous sommes donc peut-être un peu moins attardés aux stands des Ford GT-40, des Jaguar D ou E, des Porsche 356 et 9xx, des Cobra Shelby, des Ferrari 250 SWB ou autres 365 GTB, etc. lesquelles étaient, comme d’habitude, assez largement représentées et à qui nous avions déjà consacré beaucoup de temps en 2014.
Il faut noter ici que, en marge des épreuves réservées aux voitures inscrites dans les 6 plateaux habituels, se déroulaient une épreuve réservée aux voitures du groupe C, une autre aux Jaguar (lesquelles viennent toujours très nombreuses pour organiser une telle épreuve) et enfin une épreuve spécialement organisée pour marquer le 70ième anniversaire de Porsche. Par manque d’intérêt d’une part et par manque de temps d’autre part, nous n’avons pas suivi ces épreuves, préférant consacrer notre matinée à visiter les paddocks et à assister à quelques séances de qualifications des plateaux 1 à 3.
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Parmi les quelques centaines de photos que nous avons pu prendre, j’ai élaboré une sélection répartie entre 5 albums publiés dans mon espace Google-Photos. La plupart des photos sont proposées avec une légende qui peut ne pas apparaître spontanément. Dans ce cas utilisez l’icône (i) pour les afficher. Sinon, dans le présent article, vous pourrez cliquer sur les images pour les visualiser en plein écran.
Tout d’abord, pour commencer, une sélection des moments d’ambiance générale de ce qu’est Le Mans Classic. Le spectacle est partout, que ce soit en déambulant dans les allées, entre le village et les paddocks, que ce soit dans les paddocks eux-mêmes, que ce soit également sur la piste et la « pitlane » ou encore dans les tribunes.
Mais il faut aussi signaler les très nombreux espaces réservés aux clubs dont nous n’avons traversé que celui des très anciennes (années 10-20) et celui des Morgan, lesquelles étaient venues en nombre.
Enfin, à défaut d’une grande expo, comme ce fût le cas avec Ferrari en 2014, Maserati exposait deux de ses plus emblématiques voitures des années 50 avec une 250-F et une 300-S exposées aux côtés d’une très contemporaine MC12 GT1 (voir l’album).
Les quatre albums suivants regroupent les photos prises, soit dans les paddocks soit sur la piste, des voitures des différents plateaux mais regroupées selon les années soit, dans l’ordre :
- Les doyennes des années 20 à 40 qui constituent le plateau 1. Il s’agit certainement d’un des paddocks les plus intéressants, non seulement par les superbes voitures qui le composent, mais aussi par l’ambiance qui y règne. Nous avons ainsi pu croiser des passionnés souvent prêts à engager la discussion pour faire partager leur enthousiasme. Si les grosses Bentley, Talbot, Invicta ou Lagonda sont impressionnantes de tous points de vue, j’ai eu pour ma part un petit faible pour les « petites » Aston Martin, les Riley et autres Singer, ou encore pour les très élégantes BMW 328 de la fin des années 30. Sinon, parmi les quelques Alfa Romeo présentes, j’ai pu enfin voir de près le légendaire moteur Jano 2×4 cylindres d’une 8C 2300 (2) ainsi qu’une étonnante 6C 2300 de 1938 en version Mille Miglia (voir l’album).
- Les voitures des années 50 réparties entre les plateaux 2 et 3. Voici une période particulièrement riche en voitures de toutes sortes et de toutes origines. En ces années d’après-guerre se côtoyaient sur le circuit, aussi bien des voitures spécialement taillées pour la compétition que des voitures de série (ou dérivées de la série) venues pour montrer leurs aptitudes à l’endurance mécanique. C’est ainsi que nous avons rencontré des Saab, Borgward, Jowett, etc. et même une petite Dyna Panhard avec son modeste moteur de 600 cm3 ! Ceci étant, si les Jaguar XK, C et D, Maserati A6 ou 450, Porsche 356 et autres Lister ou Lotus étaient omniprésentes, il ne fallait pas oublier pour cela les petites DB Panhard, Osca, Austin Healey, Alfa SVZ, Triumph TR3, MG, ou encore Morgan. Parmi les grosses cylindrées, il était enfin impossible de passer à côté d’une Cuningham C4R et surtout de deux Cadillac série 61 dont une carrossée de manière spectaculaire (3) (voir l’album).
- Les voitures des années 60 des plateaux 3 et 4. C’est la décade de l’âge d’or des 24 heures du Mans, celle où on a vu les voitures les plus légendaires lesquelles n’étaient que très peu présentes en dehors d’une rarissime et ultime Aston Martin DP (4) et d’une Maserati Tipo-61 birdcage. A noter également une assez méconnue Marcos dotée d’une ligne superbe et motorisée par Volvo. Pour le reste, à défaut de GTO, de 330 P4, etc. les Ferrari étaient essentiellement représentées par une armada de 250 GT châssis court dont les propriétaires semblent bien être les seuls à oser les sortir, les autres étant peut-être uniquement destinées à paraître dans des musées ou des concours d’élégance…! A noter tout de même une très belle 250 LM et, comme chaque année, la GTO breadvan (5). Comme à l’accoutumée également, les Ford GT-40 étaient bien présentes tout comme les Chevrolet Corvette et autres Shelby Cobra 289. Chez Jaguar, ce sont les type E qui étaient essentiellement présentes et entre autres en version lightweight. Enfin il ne faut pas passer sous silence la nouvelle génération des Porsche, laquelle était présente avec quelques modèles 9xx, 550 ou 718. Il serait de même dommage de ne pas citer les fabuleuses Alpine A210 et A220 (voir l’album).
- Les voitures des années 70 que l’on retrouve dans les plateaux 4 à 6. Pour cette décade, je me suis principalement intéressé aux voitures de la première période qui a été marquée par le duel Porsche-Ferrari. Cette année, les Porsche 917 étaient assez nombreuses et il nous a même été possible de les approcher. Cela a permis de réaliser quelques photos de la mécanique et du châssis de cette voiture emblématique. Sa grande rivale de l’époque n’était représentée que par une Ferrari 512-S et une 512-M, cette dernière étant hélas restée pudiquement sous sa jolie bâche rouge griffée du cavallino rampante. Ici, pas question de jeter un oeil au V12… En revanche, belle surprise avec deux Alfa Romeo Tipo-33, une TT-3 de 1971 et une superbe TT-12 de 1975 (6). En plus, il nous a été permis de voir de près le gros flat-12 de 3 litres et 500 Ch. Grand moment pour moi…! Non loin, et habituée du Mans Classic, la Matra 670 de Hill et Pescarolo vainqueurs de l’épreuve en 1972. Enfin, dans le quartier des GT, rien de bien nouveau avec toujours quelques Ferrari 365/GTB groupe-IV (assez peu en fait) et une escouade de 512 BB LM qui côtoyaient des Chevrolet Corvette et autres BMW M1 (voir l’album).
Enfin, pour terminer, un album bonus regroupe toutes les photos inclassables lesquelles sont le plus souvent focalisées sur des détails, esthétiques ou surprenants, relevés sur les carrosseries, les mécaniques ou les motorisations de ces superbes voitures.
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En conclusion de cette nouvelle journée passée au Mans Classic, mon bilan est un peu en demi teinte.
Déjà, participer ainsi sur une seule journée est assez fatiguant et en même temps frustrant car il est matériellement impossible de voir tout ce que l’on voudrait. Par ailleurs même si les plateaux des participants (tout comme les espaces des clubs) sont bien fournis, on ne peut que constater l’absence des voitures qui ont marqué durablement les 24 heures du Mans et en particulier pour la période des années 50-60. En effet, ces voitures ont atteint des côtes tellement astronomiques qu’il est à peu près certain que ceux qui les possèdent (et leurs assureurs de surcroît !) n’ont pas envie de les confronter ainsi dans une manifestation populaire comme le Mans Classic, et préfèrent les garder pour eux sinon les réserver à des manifestations plus confidentielles telles que la Villa d’Este ou Chantilly par exemple, sinon les prêter temporairement à des expositions des salons ou des musées.
Ceci n’empêche pas de donner ici un grand coup de chapeau à ceux (particuliers, clubs, artisans, etc.) qui s’investissent pleinement dans cet événement avec leurs voitures et qui laissent les badauds passionnés que nous sommes les approcher et acceptent même bien souvent de discuter avec eux. Ça c’est typiquement l’esprit du Mans Classic et nous l’avons ressenti plus particulièrement avec les participants du plateau 1. Ci-contre un artisan manceau qui assurait l’assistance pour une Aston Martin 1500 et une BMW 328, et qui a passé un long moment à nous faire part de son métier et à nous expliquer les aspects méconnus de ce milieu des voitures anciennes de collection. Et puis il y a tous ceux qui nous laissent volontiers approcher de leurs voitures, voire nous y invitent, et n’hésitent pas à nous ouvrir un capot ou une portière pour faire des photos.
Aller au Mans Classic, cela se prépare et en effet je me félicite d’avoir minutieusement potassé la liste en ligne des participants. Sans cela on est à peu près sûr de passer à côté de grands moments et, de toute manière, on loupe toujours quelque chose, c’est la règle…! Pour ma part, je me donnais pour objectif d’approcher quelques voitures à qui j’avais consacré des articles durant ces dernières années. Ceci concernait, entre autres, la Ferrari 512-S, la Porsche 917, Les Aston Martin, Les Alfa Romeo 33, mais également les Jaguar C et D, les Maserati des années 50 et la Tipo-61 birdcage.
Ma moisson de photos est un peu moins importante qu’il y a quatre ans et c’est un peu normal car nous avons été un peu plus sélectifs. Les photos de détails ont été plus nombreuses tandis que les photos sur piste ou sur la pitlane l’ont été nettement moins. Il faut dire que, pour faire des photos de qualité sur piste, il faudrait pouvoir s’en approcher suffisamment, ce qui n’est pas vraiment possible pour le visiteur lambda, lequel est cantonné aux tribunes le long d’une ligne droite. Si vous souhaitez avoir une vision plus proche des voitures en action, je vous conseille d’aller visiter le site d’Arthomobiles qui a consacré 3 articles au Mans Classic 2018 et qui privilégie davantage les photos de bord de piste (voir exemple ci-dessus. Merci Nicolas !).
Enfin, il semblerait qu’il ne faille pas se faire d’illusions à propos de l’authenticité des voitures présentées. En effet, pour certaines, il est difficile de dire si on a à faire à l’originale à une reconstruction ou carrément à une réplique. C’est souvent le cas des Cobra et des GT-40 mais aussi paraît-il de certaines Porsche 917 dont des propriétaires disposeraient de l’originale et d’une copie pour montrer à l’extérieur. A titre d’exemple la Cuningham C4R était une reconstitution. J’avoue que ce genre de rumeur gâche un peu la fête mais à côté de ceci il faut se dire qu’il y a certainement une majorité d’autres voitures qui sont bien des originales, certes bien restaurées, le plus souvent à partir d’éléments originaux et dans une moindre mesure de pièces reconstituées.
Et voilà. Je ne sais pas si je retournerai un jour au Mans Classic. En tout cas, pour tous les passionnés de voitures de course de cette époque, je ne peux que recommander vivement d’y aller au moins une fois dans sa vie.
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Notes :
(1) Il existe, toute l’année de par le monde, de nombreuses manifestations similaires au Mans Classic mais, pour nous européens, le fin du fin est le festival de Goodwood.
(2) Ce moteur 8 cylindres conçu par l’ingénieur Jano était en fait une combinaison de deux blocs de 4 cylindres avec une astucieuse mécanique médiane de couplage. Ceci étant, de nombreuses années plus tard, qui sait que le célèbre flat-12 de la Porsche 917 était construit également sur la base de deux blocs flat-6 ?
(3) En ce début des années 50, les constructeurs américains rivalisaient essentiellement au niveau des motorisations, lesquelles atteignaient des sommets. En 1950, l’écurie Cuningham engageait une Cadillac type 61 Sedan qui se classa 10ième et une autre type 61 en version spyder dotée d’une carrosserie aérodynamique dont l’esthétique était discutable, d’où son surnom donné en France « Le monstre ». Elle termina à la 11ième place (en savoir plus).
(4) En 1960/61, alors qu’Aston Martin était arrivé au bout de ce qui était possible avec les DB4 GTZ, David Brown décida de lancer ce qui fût appelé les « Project Cars » destinés à contrer la suprématie des Ferrari 250 GT et surtout des GTO. 3 exemplaires furent construits sous les dénominations DP 212, 214 et 215. Celle qui était présente cette année au Mans Classic était DP212.
(5) En 1962, l’ingénieur Giotto Bizzarrini fût appelé par le conte Volpi, propriétaire de la Scuderia Serenissima, pour construire une voiture capable de contrer la Ferrari 250 GTO, Enzo Ferrari ayant refusé de lui en céder une vraie. C’est ainsi qu’est née un exemplaire de ce qui fût appelé la GTO breadvan avec sa carrosserie très spécifique dont l’arrière faisait penser à une camionnette de boulanger.
(6) Il est fort probable que la voiture présentée soit celle celle qui remporta les 1000 km de Monza en 1974 avec Merzario et Andretti.